jeudi 17 septembre 2009

Harajuku, mon amour

Il me semble que je dois partager avec vous la splendeur architecturale de Harajuku, mon amour. On parle souvent de Tokyo comme d'une ville moderne, aux lignes impeccables, ville de demain, ville futuriste même. C'est, d'une certaine façon, plutôt vrai. En fait, deux (ou douze) mondes se confondent. Tokyo a presque été entièrement détruite pendant la deuxième guerre (une autre!). Et comme Berlin, elle a dû se relever. Il y a donc très peu de quartiers anciens. Quelques temples ont survécu, quelques rues, mais très peu. Au début des années 90, le Japon était si riche qu'il aurait pu bouffer les États-Unis, puis une longue récession a accablé le pays. Aujourd'hui, il tente encore de se relever de ce dur coup qui a entre autres privatiser les lignes de trains, mis fin au règne de l'emploi à vie, et donc jeter des milliers de gens à la rue. Le pays n'est pas pauvre pour autant et surtout pas aux niveaux des idées. J'en arrive à Harajuku, mon amour. Ce quartier est un des plus vivants, un des plus prolifiques, un des plus déroutants, mon préféré, je l'avoue. Ginza fait plutôt bourgeois, Harajuku a gardé un côté en marge, jeune, surtout pas figé.
Les rues regorgent de petites maisons cubiques, souvent en béton gris, avec de larges vitrines derrière lesquelles on trouve les boutiques de designers locaux, des restos et bars éclectiques, des galeries d'art parfois intenses, souvent invitantes. On se promène donc dans le labyrinthe et chaque détour nous mène ailleurs. Quelques magasins m'ont fait mal par tant de beautés, mais surtout par tant d'originalités, de singularités, de débordements. On est au croisement du Marais à Paris, de Soho (ou East Side?) à New-York, de Kreuzberg à Berlin, mais plus encore... Je sais pas, c'est unique.
Le quartier est aussi un repère de la jeunesse branchée, colorée... Se promener sur la grande rue est comme une défilé de mode, mais rien de convenu, de formaté. Une foule bigarrée aux allures inventives, on a le goût de les prendre en photos et trouver le linge. On a le goût d'avoir ça dans tous nos shows, des lignes, des superpositions, des couleurs, des personnages à chaque coup d'oeil. Harajuku, mon amour, c'est pourtant un coin relax, où toute cette mode habille la ville, lui donne ce qui fait qu'on peut dire: oui, oui, je suis à Tokyo. Ça me rappelle ce punk, aux milles piercing et au mowhak rouge au HMV à Londres qui m'avait fait dire: je suis à Londres. Sauf que là, c'est partout!
Mais je voulais parler d'architecture (mais bon, pardonnez-moi et dites-vous que la mode vestimentaire doit certainement être traitée de la même façon comme une architecture du textile, comme une oeuvre à part entière... je m'en sors bien non?)

Harajuku mon amour, c'est aussi l'occasion de croiser, donc, des buildings aux lignes inimaginables. Tout en haut et juste ici à gauche, j'ai mis deux photos de Prada, construit tout dernièrement, au coin d'une rue qui a l'air de rien... Les artistes qui ont dessiné la tour ont voulu reproduire, en verre, la texture molletonnée d'un vêtement. Et ça marche, on dirait un morceau de linge qui pourrait s'envoler et pourtant, l'édifice nous renverse par tant de force, de présence.
Il y a donc de ci de ça, plusieurs tours qui attirent les yeux au ciel, comme les cathédrales, mais modernes celles-là, et qui nous séduisent par les lignes inhabituelles, voire impossibles, qui nous fait nous demander comment ça tient, comment ça résiste au tremblement de terre. Et en même temps, on remercie le monde qu'il y ait des endroits sur cette terre où on laisse s'élever des murs aussi magnifiques, on remercie la vie que l'art soit véritablement partout autour, que toutes les rues de cette planète ne soient pas des Boulevards Laurier.
La pureté des lignes, l'excentricité bien dissimulée, avec goût, audace, intelligence permet que se côtoie le quotidien et le sublime dans un même pâté de maison et nous fait nommer cet endroit, Harajuku, mon amour!
Plus haut, j'ai mis une photo d'une galerie d'art (j'arrive pas à la mettre ici, maudit blog!!), genre COOP, qui permet à de jeunes artistes de présenter leurs oeuvres une semaine ou deux. On entre et il y a une série de petites pièces blanches avec une terrasse derrière où ils peuvent échanger et rencontrer les visiteurs. J'ai vu de tout, allant du plus plate au plus excentrique! Cette co-habitation d'architectures savantes avec ces galeries explosives, c'est le plaisir même de ce quartier japonais qui m'a rappelé au moins trois fois depuis que je suis ici.
Avec tout ça, j'ai une première ce soir.
L'entrée en salle s'est bien déroulé, quelques frictions, dû à la traduction, à la différence des cultures, mais aussi au fait que Basta! la compagnie qui nous reçoit, est pas riiiiiche et que le directeur technique fait la régie, la patine, les courses, allouette! Je l'aime ben, mais j'avais pas besoin de gérer son stress. J'ai quand même une actrice fragile avec qui je savais plus quoi faire. La nervosité bouffe tout chez elle et il m'a fallu répéter plusieurs plusieurs fois les mêmes choses avant qui se passe de quoi. Elle avait aucun plaisir, aucune liberté, aucune foi en elle-même. Je sais pas ce qui s'est passé y a deux jours, tout a débloqué après un enchaînement désastreux. J'ai dû être plus ferme et sans gants blancs, la brasser un peu. Le lendemain, elle a accepté de se lancer et ça y est! On l'a. Depuis, ça lève, ça s'ouvre. Je suis content, ses compagnons aussi. Je me suis trouvé un kit de première, je vous dit pas comment c'est beau!

Ah oui, et hier, on a fêté. On est allé au Karaoke center. Il y en a partout. C'est vraiment très plaisant. Édifice de huit étages, des corridors avec des petites salles dans lesquelles il y a des fauteuils, une télé et un truc pour programmer des chansons. On a chanté comme des malades pendant deux heures. Les québécois en vacances, mes amis.
Carol et Marc partent dans deux jours, nous on s'envole pour Kyoto dimanche...
Je sais pas quoi penser de tout ça encore. Je veux pas que ça se finisse. Je veux pas. J'ai une petite vie ici que j'aime, que je sais éphémère, mais simple. Ma vue du 17e va me manquer. En tout cas. Je me plains pas. Je suis émotif c'est tout. Mon Québec est un monde très loin encore... Je ne sais plus où j'habite et quand je pense que j'ai un cellulaire et une télé à la maison, on dirait que je sais pas de qui je parle.
Mais faites-vous en pas... La vie me rattrapera. Surtout que je m'en vais 2 mois à Saint-Hyacinthe en revenant. My god, le charme opère.

Bonne fête Tova, Patrice et Marie si je vous revoie pas pendant mon séjour à Kyoto parce que je traînerai pas mon ordi certain. Je vous aime tellement. (je suis vraiment émotif là!)

Je vous embrasse.

Votle dévoué,

Fled

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